Élargir l’accès aux services de santé sexuelle et reproductive en Éthiopie
Addis-Abeba – En réponse aux défis aggravés par la pandémie de COVID-19 et les crises humanitaires persistantes, l’Éthiopie renforce son système de santé afin de rendre les services de santé sexuelle et reproductive plus accessibles, en particulier aux femmes et aux adolescents vivant dans les zones reculées et touchées par ces crises.
Au cœur de cette démarche se trouve la promotion de l’auto-prise en charge, une approche qui vise à doter les individus des connaissances et des outils nécessaires pour assurer eux-mêmes la gestion de leur santé sexuelle et reproductive. Cette stratégie encourage des pratiques simples, sûres et abordables, telles que la planification familiale, la prévention du VIH, la lutte contre le cancer du col de l’utérus, la nutrition, ainsi que la santé de la mère, des jeunes et des adolescents. De façon plus concrète, cette stratégie se traduit par un accès facilité aux contraceptifs, aux tests de grossesse et aux kits d’auto-dépistage du VIH, accompagnés de supports pédagogiques adaptés. L’avortement médicamenteux auto-administré, reconnu et encadré par la législation nationale éthiopienne dans des conditions spécifiques, en fait également partie.
Avec l’appui de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), les autorités sanitaires éthiopiennes ont élaboré des lignes directrices nationales sur les interventions d’auto-prise en charge, en mettant particulièrement l’accent sur la santé des femmes, des adolescents et des enfants. Ces principes ont été intégrés dans les principales politiques de santé du pays, notamment celles relatives à la planification familiale, aux soins liés à l’avortement sécurisé, à la prévention des grossesses précoces et à la santé sexuelle et reproductive en contexte humanitaire.
À travers le pays, les professionnels de santé sont formés pour accompagner les communautés dans l’adoption de pratiques d’auto-prise en charge. En juin 2024, 38 responsables de la santé publique issus du Ministère de la santé, des bureaux régionaux et d’institutions partenaires ont participé à un premier atelier de formation. Cette initiative a ensuite été déployée au niveau régional et local, permettant à 67 prestataires et gestionnaires de santé d’acquérir des compétences spécifiques en octobre 2024.
« Les recommandations et le plan d’action que nous avons développé nous permettront d’intégrer efficacement l’auto-prise en charge dans nos services de santé existants », a souligné Daniel Nadew, chef de l’équipe en charge de la santé de la mère et de l’enfant au Bureau de la santé de la ville d’Addis-Abeba.
Les résultats concrets de cette initiative sont déjà visibles. Au centre de santé de Kolfe, l’un des établissements pilotes situé à Addis-Abeba, l’introduction des services d’auto-prise en charge a entraîné une augmentation significative de l’accès à la planification familiale. En 2024, plus de 800 femmes ont ainsi pu se procurer librement des contraceptifs oraux combinés, contre 280 en 2022.
Par ailleurs, 84 femmes ont appris à s’administrer elles-mêmes un contraceptif injectable sûr et efficace, à base d’acétate de médroxyprogestérone (DMPA), et plus de 1 000 adolescentes ont reçu des préservatifs, accompagnés d’une formation sur leur utilisation correcte.
En plus, 50 femmes ont bénéficié de services d’auto-prise en charge pour l’avortement médicamenteux, assortis d’une formation complète portant sur l’usage approprié du médicament, le dosage, la reconnaissance des effets secondaires et des signes de complications, ainsi que les situations nécessitant une prise en charge médicale.
« La formation à l’auto-prise en charge a considérablement renforcé mes compétences en termes de planification familiale et de soins liés à l’avortement. Les exercices pratiques m’ont été particulièrement utiles et je me sens désormais plus confiante pour accompagner les femmes de ma communauté », a confié Fatima Belay*, professionnelle de santé à Addis-Abeba.
Fatima a également salué la caractère pratique des contraceptifs injectables auto-administrés : « J’apprécie la simplicité et la flexibilité de ce contraceptif auto-injectable, que je peux utiliser à la maison, sur mon lieu de travail ou partout ailleurs. »
Au nord de l’Éthiopie, dans la région de l’Amhara, une région durement éprouvée par les crises humanitaires, l’OMS, en collaboration avec l’Institut éthiopien de santé publique, a formé 30 prestataires de santé issus de 13 établissements situés dans des districts touchés par les conflits, sur les lignes directrices relatives aux interventions d’auto-prise en charge.
Par la suite, neuf de ces établissements ont dispensé des sessions d’orientation sur site à leur personnel, ce qui a permis de sensibiliser plus de 100 femmes et adolescentes à la gestion autonome de leur santé sexuelle et reproductive, notamment la planification familiale, les soins prénatals, la reconnaissance des signes d’alerte pendant la grossesse, la nutrition et l’accès à l’avortement sécurisé.
Le centre de santé de Gish Abay a formé 120 adolescentes à l’utilisation correcte du préservatif et a dispensé des soins d’avortement sécurisé à 35 d’entre elles. De son côté, le centre de santé de Tilili a élargi la portée des services d’auto-prise en charge pour y inclure l’auto-dépistage du VIH, l’auto-examen des seins, le test de grossesse à usage personnel, ainsi que la mise à disposition de préservatifs et de contraceptifs d’urgence.
« Ces interventions ont eu un impact positif considérable sur les communautés et contribuent à réduire les décès maternels et périnatals évitables. Elles nous permettent de mieux répondre aux besoins des mères, des nouveau-nés, des enfants et des adolescents les plus vulnérables », a ajouté Daniel Nadew.
Selon le Dr Owen Kaluwa, Représentant de l’OMS en Éthiopie, « l’engagement de l’Éthiopie en faveur de l’auto-prise en charge permet aux individus, en particulier aux femmes et adolescentes, de prendre leur santé en main, leur offrant ainsi davantage de liberté, de confort et de bénéfices économiques. L’OMS est fière de soutenir cette dynamique qui contribue à améliorer les résultats sanitaires en facilitant l’accès à des services essentiels, notamment dans les zones affectées par des conflits ».
*Nom modifié