Un plan d’accouchement pour réduire les décès maternels en Côte d’ivoire

Bouaké – En Côte d'Ivoire, en 2017, le ratio de mortalité maternelle était de 614 décès maternels pour 100 000 naissances vivantes très loin de la cible de 140 décès maternels pour 100 000 naissances vivantes attendue à l’horizon 2030. Gbêkê fait partie des régions sanitaires où le taux de mortalité était l’un des plus élevés du pays.

Face à ces décès maternels dont la plupart peuvent être évités, les autorités sanitaires ivoiriennes ont conduit un plaidoyer auprès de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), pour une assistance technique et financière afin de pouvoir inverser la tendance.

Ainsi en 2021, l’OMS avec le soutien du gouvernement suédois et du fonds français MUSKOKA, a appuyé cette région sanitaire à travers l’initiative « Gbêkê Là-Haut Là ».

Ce programme vise à renforcer les compétences des sage-femmes en matière de prise en charge des complications obstétricales, notamment l’hémorragie du post-partum, qui est la première cause des décès maternels en Côte d'Ivoire. L’initiative, planifiée sur trois ans, s’est donnée comme objectif de réduire les décès maternels évitables de 75 % de 2022 à 2024 avec une baisse annuelle de 25 %.

L’initiative « Gbêkê Là-Haut Là » intègre la mise en œuvre du plan de préparation à l’accouchement ou plan d’accouchement qui démarre dès les premières consultations prénatales, le chariot d’urgence dans la salle d’accouchement et le renforcement de capacités des sage-femmes à la gestion des facteurs de risque lors de la grossesse et de l’accouchement.

Fatoumata, commerçante à Bouaké, vient d’accoucher d’un garçon en bonne santé. Pour sa deuxième grossesse, elle s’y est prise très tôt dès la première consultation prénatale, contrairement à sa grossesse précédente.

« La fois dernière, ça été difficile. Je me suis retrouvée seule à la maternité car mon mari était en voyage et il n'y avait personne pour m'accompagner à la maternité. Nous habitions loin de la famille », se rappelle la jeune dame.

Arrivée à la maternité à la dernière minute toute stressée avec une légère hausse de tension artérielle, Fatoumata aurait pu avoir des complications pendant la délivrance. Pour son premier accouchement, il y a trois ans, elle n’avait pas fait un plan d’accouchement.
Le plan d’accouchement prépare la femme et sa famille pour un accouchement dans de bonnes conditions prenant en compte sa situation médicale et sociale. Sa mise en œuvre se fait à travers un soutien tout au long de la grossesse pour identifier avec la femme, le lieu de l’accouchement de son choix, et déterminer les dispositions à prendre dès le début de la grossesse : entre autres l’épargne, des linges propres pour la mère et le nouveau-né, le carnet de santé de la mère et de l’enfant, le moyen de transport au moment du travail, l’organisation familiale, etc.

C’est un véritable outil qui permet d’anticiper en cas de complications pouvant déboucher sur des décès. Grâce au plan d’accouchement, la femme enceinte communique ses souhaits et ses besoins à l'équipe médicale, ce qui contribue à réduire le stress et l'anxiété pendant l'accouchement.

L’initiative « Gbêkê Là-Haut Là » implique les femmes et leurs conjoints respectifs dans la planification et le suivi de la grossesse. Pour l’année 2022, 46 % des femmes enceintes vues en consultation prénatale ont bénéficié d’un plan de préparation à l’accouchement contre aucune avant la mise en œuvre de l’initiative.
« Nous nous sommes rendu compte qu’on peut prévenir les décès maternels avec de simples approches comme le plan d’accouchement par exemple. Et pour se faire, les sage-femmes doivent elles-mêmes maîtriser le contenu et les étapes de mise en œuvre d’un plan d’accouchement. C’est à ce niveau précis que les renforcements de capacités ont été déterminants », a déclaré la Représentante par intérim de l’OMS en Côte d’Ivoire, Dre Fatim Tall Thiam.

Au total, 181 sage-femmes des 18 formations sanitaires impliquées dans l’initiative, ont été formées sur les compétences cliniques clés qui sauvent la vie. Des mesures visant à réduire les décès maternels évitables ont été prises en faisant un focus sur l’hémorragie du post-partum, qui était responsable de 49 % des décès maternels enregistrés dans le pays en 2020, l’hypertension artérielle et ses complications ainsi que les infections dues aux avortements qui sont les principales causes de décès maternels.

« Nous observons une prise de conscience du côté des sage-femmes. Elles sont conscientes qu’elles tiennent deux vies entre leurs mains. Elles connaissent aujourd’hui les motifs pertinents d’évacuation, avec des diagnostics clairs et elles travaillent avec assurance », explique Rachel Affouet Kouadio, Coordonnatrice Santé mère-enfant du district sanitaire de Bouaké Nord-Ouest.

« Nos sage-femmes maitrisent le protocole du traitement d’attaque en vue de baisser la tension artérielle des parturientes avant leur évacuation à un niveau supérieur pour une meilleure prise en charge. Les cas qui vont au CHU sont uniquement des cas dont la prise en charge nécessite des capacités au-delà de celles du centre de santé. »


En plus du renforcement des capacités des prestataires, la présence de chariots d’urgence dans les salles d’accouchement avec des médicaments de première nécessité à disposition en cas de complication, joue un rôle important.

Entre 2019 et 2022, parmi les décès survenus au CHU de Bouaké, d’une part, la proportion des décès maternels provenant des 3 districts sanitaires urbaines de Gbêkê, a diminué de 93 % à 36 % soit une réduction de 57 %, et d’autre part, la proportion des décès maternels dus aux hémorragies du post-partum a connu une réduction de 27 % passant de 56 % à 29 %.
Cette stratégie d’amélioration de la qualité des soins en vue de la réduction des décès maternels et néonatals s’avère bénéfique.

Le suivi après l’accouchement est une pratique qui permet de limiter les surprises désagréables après l’accouchement.
« Lorsqu’une femme finit d’accoucher, elle passe au moins deux heures en salle d’accouchement et nous la surveillons. Ensuite on la met en salle de suites de couches immédiates. S’il n’y a pas de complication dans les 24 heures, on la met en salle de suites de couches tardives pour une durée de 72 heures avant de la libérer », explique Néné Sidy Baldé sage-femme à l’hôpital général de Béoumi.

« Chaque mardi, nous avons des formations d’appoint, dans le cadre de cette initiative, qui nous apportent beaucoup. »

Dans trois jours, Fatoumata pourra rentrer chez elle avec son fils, si aucune complication ne survienne entre temps.

Après avoir été sensibilisée par la sage-femme, elle allaite son bébé et promet de le nourrir exclusivement au sein pendant les six prochains mois.

« Les sage-femmes sont toujours à l'écoute et très gentilles. Elles m’ont donnée de nombreux conseils pour mon bien et celui de mon bébé. Elles m’ont aidée à préparer mon accouchement petit à petit, jusqu’au jour J », ajoute-t-elle. « Le plan d’accouchement m’a beaucoup aidée. »
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