Fièvre de la Vallée du Rift au Sénégal : en première ligne pour protéger les communautés
Dakar — Depuis septembre, le Sénégal fait face à une épidémie de fièvre de la Vallée du Rift (FVR), une maladie virale transmise par les moustiques ou par contact avec des animaux infectés. Touchant à la fois les humains et le bétail, elle circule particulièrement dans les zones d’élevage et dans les zones de transhumance.
Au 23 novembre, trois mois après la déclaration de l’épidémie, les autorités sanitaires dénombrent 500 cas humains confirmés, dont 457 guéris et 31 décès, sur plus de 15 400 prélèvements réalisés. Du côté animal, 425 cas ont été confirmés chez les moutons, chèvres et bovins, avec plus de 2 000 avortements signalés, principalement dans la vallée du fleuve Sénégal. Plus de 40 000 animaux ont été vaccinés autour des foyers pour freiner la propagation.
Au cœur de cette crise, des malades témoignent. À Kaolack, Diène Ndiaye, conducteur de mototaxi, se rappelle : « Je pensais que c’était une grippe. La fièvre est montée d’un coup, j’avais la tête lourde, les yeux qui me brûlaient. Quand les équipes sanitaires ont fait un dépistage dans mon quartier, j’ai été soulagé. Ils m’ont testé, traité et rassuré. Aujourd’hui, je dis à tout le monde : prenez les premiers signes au sérieux et utilisez les moustiquaires. »
Dès les premiers cas, le Ministère de la Santé et de l’Hygiène publique a activé le Centre des opérations d’urgence sanitaire pour coordonner la réponse. Avec l’appui de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) et d’autres partenaires, y compris les secteurs animal et environnemental, la stratégie « Une seule Santé » a été mise en place afin d’intégrer les dimensions humaines, animales et environnementales. Cette approche a permis une mobilisation rapide des ressources, le déploiement d’équipes et un appui technique continu et de qualité.
Dans les régions affectées, la réponse s’est traduite par des actions concrètes : surveillance renforcée avec une détection rapide des cas, prise en charge des patients, distribution de matériel de soins et de laboratoire, formations et sensibilisation communautaire. Les équipes d’intervention rapide multidisciplinaires SURGE, formées par l’OMS, se sont rendues dans les régions de Saint-Louis, Kaolack et Fatick pour la recherche active des cas, enquêter dans les zones à risque et informer les communautés sur la maladie. Des échanges avec la Mauritanie et la Gambie ont permis d’harmoniser les stratégies transfrontalières le long du fleuve Sénégal.
A Golléré, dans le nord du pays, Aïssatou Sow , éleveuse, a vécu des semaines difficiles : « Deux de mes chèvres ont avorté la même semaine. Puis, mon mari qui avait manipulé les avortons, a eu une forte fièvre. Les équipes de santé et les services vétérinaires sont venues en moins de 48 heures, nous ont testés et l’ont pris en charge. Ils nous ont expliqué comment nous protéger : éviter le contact avec le sang ou la viande crue, dormir sous moustiquaire. Sans leur visite, la situation aurait pu être bien pire. »
Chaque jour, les équipes régionales suivent l’évolution de l’épidémie grâce aux données de terrain et aux systèmes d’alerte renforcés. Pour accélérer la réponse, l’OMS a déployé plusieurs experts auprès des équipes locales afin d’identifier rapidement les défis techniques et organisationnels. L’Organisation a aussi fourni 850 kg de matériel médical et de médicaments, suffisants pour traiter plus de 10 000 patients sur quatre mois, et formé 138 professionnels de santé aux protocoles de triage et de prise en charge. Onze structures sanitaires ont été supervisées pour garantir l’application des standards, notamment dans les régions de Kaolack, Fatick et Saint-Louis, où des kits de soins, des solutions intraveineuses et quatre tonnes d’oxygène médical ont été mis à disposition.
Le Dr Boly Diop, chef de la division Surveillance au ministère de la Santé et de l’Hygiène publique a souligné que l’appui technique et opérationnel de l’OMS a été déterminant pour renforcer rapidement la surveillance épidémiologique, améliorer la qualité des investigations et harmoniser les outils de détection dans les régions touchées. « Cet accompagnement a joué un rôle essentiel dans la rapidité de la réponse et dans la capacité du Sénégal à contenir la propagation de la maladie. »
Les données indiquent que 70 % des cas humains concernent des bergers, éleveurs, bouchers et d’autres travailleurs de la filière viande, professions exposées aux animaux infectés et aux piqûres de moustiques. Les districts de Saint-Louis, Louga, Matam et Kaolack concentrent la majorité des cas, tandis que Fatick et Tambacounda enregistrent une progression récente. La fin de la saison des pluies, avec des eaux stagnantes qui favorisent la prolifération des moustiques, constitue un défi supplémentaire. Grâce à la collaboration entre secteurs, les analyses sont désormais plus rapides, soutenues par l’Institut Pasteur de Dakar et le Laboratoire National d’Élevage et de Recherches Vétérinaires.
Pour le Dr Okou Bisso, gestionnaire de l’incident au bureau de l’OMS au Sénégal, le travail collectif est central : « Nous restons aux côtés du Gouvernement pour contenir l’épidémie. La baisse des cas montre que cette coopération renforce la capacité du système de santé à protéger les communautés. »
La prévention et le contrôle des infections ont également bénéficié d’un soutien important : plus de 200 000 équipements de protection individuelle (EPI) (masques, gants, surblouses, gels) ont été fournis, accompagnés de protocoles mis à jour pour la gestion des déchets biomédicaux. Des évaluations ont eu lieu dans cinq régions pour s’assurer du respect des standards et affiner la définition des cas, améliorant ainsi la détection précoce.
La communication sur les risques et l’engagement communautaire se sont révélés essentiels. Plus de 70 émissions radio en langues locales ont été diffusées, 110 leaders religieux ont relayé les messages de prévention, et plus de 15 300 personnes — éleveurs, bergers, bouchers, transporteurs — ont été sensibilisées lors de sessions directes. Les agents SURGE ont également renforcé les compétences de 32 journalistes pour garantir une information fiable et adaptée aux réalités locales.
Trois mois après le début de l’épidémie, les efforts déployés se traduisent par des vies protégées et des communautés mieux informées. Dans les villages et les « loumas », marchés hebdomadaires de bétail, les équipes de santé poursuivent le travail : expliquer les signes d’alerte, encourager la déclaration rapide des cas, rappeler l’importance de l’utilisation des moustiquaires et éviter les contacts avec les animaux malades. Chaque échange contribue à réduire la transmission et à renforcer la confiance. L’attention est également mise sur les zones non encore touchées où des actions de préparation sont réalisées pour permettre à ces régions et districts d’être prêts en cas d’apparition de l’épidémie.
Pour le Dr Michel Yao, Représentant de l’OMS au Sénégal, cette mobilisation est exemplaire : « Notre priorité est de protéger les communautés en renforçant la détection précoce, la prise en charge et la prévention. L’engagement quotidien des équipes montre qu’en unissant nos efforts — autorités sanitaires du secteur humain, secteur animal, experts de l’environnement, partenaires et communautés — nous pouvons réduire l’impact de la fièvre de la Vallée du Rift et sauver des vies. »
Quant à Diène, aujourd’hui totalement remis, il souligne avec gratitude que ces actions ont une signification très concrète. « Après ces jours de fièvre et de douleurs, je suis soulagé de retrouver la santé. Je souhaite que chacun respecte les mesures de prévention. »
Chargée de communication
Bureau Régional de l'OMS pour l'Afrique
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Chargée de Communication
OMS Sénégal
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