Madagascar : Une riposte multisectorielle renforce la lutte contre le paludisme et sauve des vies à Ikongo
Ambatofotsy – « Voir Felana perdre ses forces m’a terrifié. Nous avons dû la transporter à moto sur cinq kilomètres pour atteindre le centre de santé. À notre arrivée, elle a été immédiatement prise en charge et un traitement lui a été administré », raconte Mahery Razafimahefa, commerçant dans la commune d’Ambatofotsy, dans le district enclavé d’Ikongo, région Fitovinany.
Au premier semestre 2025, Ikongo a été frappé par une recrudescence sévère de paludisme, avec plus de 2 403 cas confirmés, dont de nombreux cas graves aggravés par la malnutrition : 232 cas de malnutrition aiguë ont été enregistrés, ainsi qu’environ 250 décès communautaires. Dans cette zone où les pistes sont difficiles et les centres de santé éloignés, de nombreuses familles se sont retrouvées en détresse.
Mahery se souvient du jour où sa femme, Felana Mahitsy, a commencé à s’affaiblir. « C’était en juin 2025. Elle avait des vertiges, des maux de tête… et la situation s’aggravait de jour en jour. Plusieurs voisins étaient déjà tombés malades. Nous ne savions pas que la flambée prenait autant d’ampleur », explique-t-il.
Face à la gravité de la situation, le Gouvernement malagasy a déclaré l’urgence sanitaire en juin 2025. Le Bureau National de Gestion des Risques et Catastrophes (BNGRC) a été chargé de coordonner une riposte multisectorielle, mobilisant le Ministère de la Santé Publique, l’OMS, l’UNICEF, Médecins Sans Frontières (MSF) et d’autres partenaires.
L’OMS a joué un rôle déterminant en déployant des experts (épidémiologiste, clinicien, logisticien) en fournissant plus de 15 000 tests de diagnostic rapide, 12 000 traitements antipaludiques, et d’autres intrants médicaux essentiels ainsi que des abris pour la prise en charge des malades, grâce au Pandemic fund. Elle a également apporté un appui logistique indispensable pour atteindre les villages les plus enclavés et à assurer la fonctionnalité du COUSP. L’UNICEF a déployé deux cliniques mobiles qui ont apporté des soins à plus de 5 260 personnes, tandis que MSF a renforcé la prise en charge intégrée des enfants souffrant à la fois de paludisme et de malnutrition.
Pour Mahery et sa famille, cette assistance a été cruciale. Sa femme a pu être traitée gratuitement dans une chambre équipée grâce au soutien des partenaires. « Sans cette aide, nous n’aurions jamais pu obtenir les soins nécessaires. Depuis cette intervention, notre village n’a plus enregistré de décès dus au paludisme », confie-t-il.
La riposte a produit des résultats rapides. Les 30 formations sanitaires du district ont été mobilisées, tandis que les équipes communautaires ont intensifié les activités de dépistage, atteignant plus de 7 783 ménages. Au total, 901 moustiquaires imprégnées ont été distribuées et un centre nutritionnel thérapeutique (CRENI) a été activé à Ambatofotsy. En seulement deux mois, le taux de létalité est passé de 4,5 % à 1,2 %. Le pic observé en juillet 2025 a pu être maîtrisé grâce à cette action coordonnée.
« L’intervention collective a été déterminante pour éviter une catastrophe. Sans l’appui de l’OMS, de l’UNICEF, de MSF et des autres partenaires, nous n’aurions jamais atteint à temps les villages enclavés. Les cliniques mobiles, les moustiquaires et les médicaments ont réellement sauvé des vies », a expliqué la Dr Arlette TSARALAHY, Médecin Inspecteur du district d’Ikongo.
L’histoire de Mahery et Felana illustre l’impact humain de cette riposte. Elle montre comment une action coordonnée, portée par la solidarité et un partenariat renforcé, peut transformer la trajectoire d’une famille, d’un village et d’un district tout entier.
« L’accès équitable aux soins est au cœur de la mission de l’Organisation. Même dans les zones les plus enclavées, les populations doivent pouvoir bénéficier des services de santé dont elles ont besoin. L’OMS restera aux côtés du Ministère de la Santé pour renforcer la surveillance, accompagner les soignants et soutenir les efforts visant à briser la transmission du paludisme dans les districts à haut risque », a affirmé le Professeur Laurent Musango, Représentant de l’OMS à Madagascar.
En renforçant la préparation, la surveillance, l’engagement communautaire et la résilience des services de santé, Madagascar avance vers un système plus robuste, mieux équipé pour prévenir les flambées futures et protéger durablement les populations les plus vulnérables.