Vacciner les tout-petits au Sénégal, peu importe où ils se trouvent
Dakar – Jusqu’à l’âge de 7 mois, Ourèye n’avait jamais été vaccinée. Premier enfant de ses parents, elle vit avec sa famille dans le quartier Mbenguène, à l’ouest de Dakar. Maguette, sa mère, avoue n’avoir pas été sensibilisée à l’importance de la vaccination pour la vie de son enfant.
Comme Ourèye, en 2021, environ 70 000 enfants de moins de deux ans au Sénégal n’avaient jamais été vaccinés. Ils sont appelés "zéro dose" par les professionnels de la santé. Leur nombre n’a cessé de croître, passant de 3 % en 2017 à 6 % en 2023, selon les données de l'enquête démographique et de santé de 2023. Cette situation est principalement due à l’impact négatif de la pandémie de la COVID-19 sur le système de vaccination de routine au Sénégal.
La COVID-19 a aussi fait régresser le pays en ce qui concerne la vaccination complète des enfants de 12 à 23 mois. Le pourcentage d’enfants, de cette tranche d’âge, ayant été complètement vaccinés a connu une baisse de 13 points en quatre ans, passant de 77% en 2019 à 64 % en 2023. Pourtant le Sénégal avait fait d'importants progrès dans ce domaine de 2005 à 2019 où le pourcentage des enfants de 12 à 23 mois ayant reçu tous les vaccins de base avait augmenté de 18 %.
L’Etat sénégalais travaille à ramener les indicateurs de la vaccination à un niveau plus élevé que ceux d’avant la COVID-19. Avec le soutien de ses partenaires, le pays veille à ne laisser aucun enfant de côté. Dans ce cadre, grâce à un financement de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), il a mis en place un dispositif de veille épidémiologique qui a permis de déployer 19 consultants du Programme Elargi de Vaccination (PEV) dans ses 14 régions.
Opérant au niveau des centres de santé des districts sanitaires, ces consultants ont pour rôle d’appuyer les équipes de vaccination de routine, de renforcer la surveillance épidémiologique et d’aider à atteindre les enfants "zéro dose". Leur approche repose sur la vaccination au sein des structures de santé touchant les populations dans un rayon de 15 kilomètres et sur le déploiement d’équipes mobiles afin d’atteindre les personnes vivant dans des zones plus éloignées.
Grâce à cette stratégie à deux volets, la couverture vaccinale dans le district Ouest de Dakar a significativement augmenté, passant de 70 % à 85 % en moins d’un an, de janvier à novembre 2023. « En 2024 nous devons vacciner un peu plus de 1300 enfants, ce qui représente une centaine d’enfants par mois. Mais assez souvent, nous atteignons notre cible mensuelle en seulement quelques jours », a affirmé Amina Diagne, responsable du PEV au niveau du centre de santé Philippe Maguilène Senghor. « Non seulement nous dépassons nos objectifs, mais nous arrivons à enrôler et à fidéliser les mamans d’enfants "zéro dose". »
Ce succès, les professionnels de la santé le doivent aussi aux membres de la communauté, en particulier les Badiène Gox, qui sont impliquées dans ce mécanisme d’atteinte des enfants non vaccinés. Les Badiène Gox sont des marraines de quartier choisies consensuellement par les populations de leurs localités, qui jouent un rôle d’encadrement et de soutien au bénéfice des femmes en âge de procréer au Sénégal. Elles sont formées sur le calendrier vaccinal, les types de vaccins fournis par le PEV, les avantages de ces vaccins, leurs éventuels effets secondaires et les moyens d’informer les prestataires sur ces effets. Elles appuient la stratégie de rattrapage des enfants "zéro dose", en contribuant à la sensibilisation et à l’information des populations.
« C’est en allant dans les quartiers reculés que nous repérons des enfants "zéro dose". Certains parents manquent de temps pour emmener les enfants se faire vacciner, car les horaires de vaccination coïncident avec ceux de leurs activités professionnelles » a déclaré Fama Faye, Badiène Gox à Mbenguène. « D’autres s’opposent à la vaccination à cause des rumeurs. Ceux-là sont très difficiles à convaincre, mais nous y arrivons quand même ».
Cette détermination à garantir à chaque enfant son droit à la vaccination est portée par l’OMS. « Un enfant non vacciné est une opportunité manquée de prévention. Nous devons redoubler d'efforts pour atteindre ces enfants vulnérables et leur offrir une protection contre les maladies évitables par la vaccination », a rappelé le Dr Jean Marie Vianny Yaméogo, Représentant de l'OMS au Sénégal.
L’Organisation adopte une approche holistique dans son soutien au pays en matière de vaccins. Ainsi, en dehors de son appui à la stratégie de récupération des enfants "zéro dose", l’OMS assiste le Sénégal dans la mise en œuvre du Projet d’optimisation de l’approvisionnement en vaccins et consommables. Ce projet a permis de rendre disponibles plus de 3 000 000 de doses de vaccins, entièrement achetés par l’Etat sénégalais, en 2023 via GAVI, l'Alliance du Vaccin. « Chaque enfant vacciné est une victoire pour la santé publique. Nous devons capitaliser sur ces succès pour étendre notre action et atteindre davantage d'enfants "zéro dose" », a souligné le Dr Karim Diop, médecin chef de district.
La stratégie de récupération des enfants "zéro dose" a permis à la petite Ourèye de suivre son calendrier vaccinal. Ce programme de surveillance épidémiologique a également aidé à détecter et à vacciner plusieurs autres enfants. « Je n’ai jamais su que la vaccination était si importante pour la santé de ma fille », a mentionné Maguette, soulagée de voir Ourèye protégée. « Maintenant, j’ai compris. Je ne vais plus manquer de dose de vaccination pour elle », a-t-elle ajouté.
Chargée de Communication
OMS Sénégal
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Chargée de communication en appui aux pays francophones
Bureau régional Afrique de l’OMS
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