Relever le défi de la résistance aux antimicrobiens en Éthiopie

Addis-Abeba ‒ En Éthiopie, les rapports de surveillance de plus de 4 000 centres de santé à travers le pays font état d’une tendance très élevée et d’une charge croissante des infections résistantes aux antimicrobiens, qui se produit lorsque les agents pathogènes changent au fil du temps et ne répondent plus aux médicaments. Par exemple, la résistance de la bactérie responsable de la fièvre typhoïde) a été multipliée par près de neuf, passant de 10 % en 2006 à plus de 87 % en 2019. De même, les souches de la bactérie E. coli, qui provoque des infections montrent une résistance croissante aux antibiotiques plus puissants. 


Les antimicrobiens sont des types de médicaments utilisés pour prévenir et traiter les infections chez les humains, les animaux et les plantes. La résistance aux antimicrobiens rend les infections plus difficiles à traiter et augmente le risque de propagation de la maladie, de maladie grave et de décès. 

Les autorités sanitaires éthiopiennes prennent des mesures pour faire face à cette menace croissante. Avec le soutien de l'Organisation mondiale de la Santé (OMS) et un financement du Royaume d'Arabie saoudite, le Ministère de la santé élabore des politiques et forme des travailleurs de la santé afin de promouvoir l’utilisation appropriée des antimicrobiens, d'améliorer les traitements, de réduire la résistance aux antimicrobiens et de freiner la propagation des infections causées par des germes résistants aux médicaments.
 

Les deux derniers mois ont été pénibles pour Yeshiembet Moges, âgée de 45 ans. Tout a commencé en 2022 avec ce qu’on pensait être la grippe, qui a ensuite été identifiée comme étant la tuberculose et traitée en conséquence.

Cependant, il y a quelques mois, le quotidien de Yeshiembet a basculé lorsqu’elle a commencé à ressentir un ensemble de symptômes inquiétants – évanouissement, essoufflement, fièvre et transpiration, entre autres.

« Ce fut la période la plus épuisante et la plus difficile de toute ma vie », a déclaré Yeshiembet. « Chaque respiration était un combat, et la tâche la plus simple devenait difficile à réaliser. »

Il s’avère que l’antibiotique qu’elle prenait pour traiter la tuberculose ne fonctionnait pas parce que la bactérie à l’origine de l’infection avait développé une résistance audit antibiotique. Ceci a entraîné des lésions et une inflammation du tissu pulmonaire de Yeshiembet, nécessitant des soins médicaux immédiats et une assistance respiratoire.
Heureusement, Yeshiembet a été admise au ALERT Comprehensive Specialized Hospital d’Addis-Abeba, où la gestion des antimicrobiens est mise en œuvre, grâce au leadership du Ministère éthiopien de la santé et à l’appui technique de l’OMS.

Bien que son cas ait présenté des complications dues à une tuberculose multirésistante et ait nécessité une assistance respiratoire prolongée, Yeshiembet est prise en charge par une équipe de travailleurs de la santé bien formés à la gestion des antimicrobiens. Grâce à une surveillance étroite, à des tests de culture en laboratoire et à des médicaments appropriés, son état de santé s’est amélioré.
« Le nombre de personnes que nous admettons chaque mois dans notre service de gestion des antimicrobiens ne cesse d’augmenter », a expliqué le Dr Eliud Teshome. « Le cas de Yeshiembet est l’un des nombreux cas que nous avons traités ce mois-ci. Nos enquêtes ont montré qu’il s’agit d’un cas de résistance à plusieurs médicaments, qui nécessite un suivi intensif dans lequel nous fournissons des médicaments soigneusement sélectionnés et dosés », a-t-il ajouté.
L’Éthiopie est l’un des rares pays de la Région africaine qui dispose d’un plan d’action national chiffré et multisectoriel sur la résistance aux antimicrobiens, signé par les ministères chargés de la supervision des secteurs de la santé humaine, animale et environnementale. Le plan inclut l’intégration de la surveillance et de la gestion des antimicrobiens dans la riposte aux situations d’urgence sanitaire et au niveau des soins de santé primaires, avec l’appui des décideurs, des gestionnaires de la santé, des professionnels de la santé et du public.

L’enregistrement et la notification de données sur la résistance aux antimicrobiens sont essentiels pour l’élaboration de politiques et la prise de décisions fondées sur des données. Selon un rapport de l’Institut éthiopien de santé publique, le nombre de sites de surveillance, issus des secteurs de la santé et pharmaceutique, qui génèrent les données nécessaires, est passé de 9 à 21 entre 2021 et 2023. Cela fait de nouveau de l’Éthiopie l’un des premiers pays de la Région africaine à disposer d’un système de surveillance de l’utilisation des antimicrobiens dans les établissements de santé.
Des données sont en cours de compilation et serviront de base à une enquête sur la prévalence qui démontrera l’étendue de la résistance aux antimicrobiens dans le pays. Grâce à ces renseignements, le gouvernement peut élaborer des activités stratégiques, adaptées et pratiques.

« L’OMS est encouragée par le leadership proactif et l’engagement du gouvernement éthiopien à lutter contre cette menace croissante pour la santé publique », déclare la Dre Nonhlanhla Rose Dlamini, Représentante par intérim de l’OMS en Éthiopie. « Des partenaires précieux comme le Royaume d’Arabie saoudite ont également aidé l’OMS à avancer sur cette question. »
Plus de 250 professionnels de la santé, y compris des médecins, des pharmaciens et des techniciens de laboratoire, dans 70 établissements de santé ont été formés pour mettre en œuvre une gestion des antimicrobiens et un traitement fondé sur des données probantes pour la prise en charge des infections. Le gouvernement a également mis en place une formation en ligne pour les professionnels de la santé à travers le pays. De nombreux établissements de santé produisent actuellement des tests localisés qui montrent la résistance de certains germes à différents antimicrobiens (appelés antibiogrammes).
« Nous bénéficions grandement du programme de renforcement des capacités qui est mis en œuvre au profit des travailleurs de laboratoire, des médecins et des pharmaciens afin de leur permettre de gérer efficacement la résistance aux antimicrobiens chez nos patients », a indiqué Tigist Shimeles, pharmacienne à ALERT Comprehensive Specialized Hospital.

« Étant donné que la prochaine pandémie constitue une menace pour la vie humaine, ces cas exigent beaucoup plus d’attention. Les responsables des établissements de santé doivent être davantage sensibilisés sur la nécessité de fournir aux professionnels de la santé des informations et des données à jour et d’organiser davantage de sessions de formation en ligne », a-t-elle ajouté.
Cette expérience a été un signal d’alarme pour Yeshiembet. « J’ai toujours entendu des annonces à la radio et à la télévision encourageant les gens à prendre leurs médicaments tels qu’ils sont prescrits. J’ai toujours cru que cela ne me concernait pas. Aujourd’hui, je suis confrontée à une série de problèmes graves dans ma vie », a-t-elle laissé entendre. « J’ai la chance d’avoir survécu à cette épreuve et je remercie tout le personnel médical de l’hôpital. »
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FITA Yetenayet

Communication officer
WHO Ethiopia
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Meenakshi Dalal

Chargée de relations avec les média
Bureau Régional de l'OMS pour l'Afrique
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