Une approche innovante pour améliorer la santé des adolescents et des jeunes en RDC

Une approche innovante pour améliorer la santé des adolescents et des jeunes en RDC

Kinshasa, le 14 mars 2022 – Armande*, originaire du Kongo Central à l’ouest de la République Démocratique du Congo (RDC), se remémore la première fois qu’elle s’était rendue dans un centre de santé, il y a plusieurs années. « J’étais beaucoup plus jeune et ça s’était vraiment mal passé ! J’espérais obtenir des informations sur le VIH, et l’infirmière que j’ai trouvée là s’est moquée de moi devant tout le monde à cause de mon âge », se souvient-elle en hochant la tête avec un sourire navré.

Les adolescents sont confrontés à différents problèmes de santé et phénomènes de société tels que les infections sexuellement transmissibles (IST), y compris le VIH, les violences sexuelles, et pour les filles les grossesses précoces et non désirées, ainsi que le mariage précoce. Plusieurs facteurs en sont la cause, entre autres, le manque de connaissances des jeunes et adolescents sur leur santé de façon générale, leur faible accès à l'éducation sexuelle complète, aux services de contraception conviviaux ainsi que les pesanteurs culturelles.

En RDC, l’accès des adolescents et jeunes aux services de santé sexuelle et reproductive de qualité représente un défi que le gouvernement s’est engagé à relever. Selon le Plan stratégique pour la santé et le bien être des adolescents et jeunes (2021-2025), 32,8 % de la population est âgée de 10 à 24 ans. Seuls 17% des jeunes et adolescents ont accédé aux services de santé en RDC selon le logiciel DHIS2 en 2021.

Pour améliorer la qualité de ces services, l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) a appuyé la mise en œuvre d’un projet innovant d’apprentissage collaboratif financé par le Fonds Mondial. A travers ce processus, des prestaires de services travaillent ensemble pour identifier des problèmes communs, les discuter et aboutir à des solutions appropriées. Les prestataires renforcent ainsi leurs connaissances, tout en développant des attitudes positives qui influent sur l’offre et utilisation  des services de santé par les adolescents.

Le directeur du Programme National de la santé des adolescents (PNSA), Fidèle Mbadu Muanda, explique le bien-fondé de cette initiative : « Avec l’aide des partenaires, nous sommes en train de relever le défi d’améliorer les services de santé des adolescents et jeunes d’une manière générale, avec un accent particulier sur la santé sexuelle et reproductive et les droits des adolescents et jeunes. Les adolescents et jeunes ont besoin de services qui leur conviennent, et l’apprentissage collaboratif est centré sur le renforcement des capacités et le changement d’attitude des prestataires. Sur le plan national, nous avons harmonisé les normes et politiques liées aux services de soins de santé des adolescents et jeunes pour les rendre conformes aux orientations de l’OMS. »

L’OMS a fourni les directives techniques et a assuré la formation des formateurs qui ont été briefés de sorte à encourager le groupe à en venir à des solutions adaptées à leurs défis particuliers. L’OMS a également assuré la conception de supports de qualité pour les prestataires. 

Dr Symplice Mbola Mbassi, spécialiste de la santé des adolescents et des jeunes au bureau régional de l’OMS pour l’Afrique, se félicite de la mise en œuvre du projet : « L’apprentissage collaboratif est innovant à plus d’un titre. Il permet la participation de tous, en les poussant à faire l’état des lieux par eux-mêmes et à identifier ensemble les thèmes à couvrir, contrairement à l’approche classique de formation où les thèmes étaient en quelque sorte imposés aux apprenants. Ils apprennent l’un de l’autre et s’inspirent de l’expérience et des bonnes pratiques de chacun. »

Le projet a été mis en œuvre en RDC de 2018 à 2019, dans six districts des provinces du Kasai Oriental (Mbuji-Mayi) et Kinshasa. 32 sessions d'apprentissage collaboratif ont été organisées avec 10 participants par rencontre, dont Jeannette Mudipanu, Infirmière au Centre Hospitalier Saint Clément dans la Zone de santé de Makala.

Pour sa seconde visite dans un centre de santé, Armande a été reçue par Jeannette. Ce fut une expérience positive, comme l’explique Armande : « La première chose que j’ai appréciée, c’est l’accueil. Elle m’a reçue dans un espace privé et elle a répondu à mes questions sans me juger. J’ai reçu des conseils sur comment prévenir les infections sexuellement transmissibles y compris le VIH, les grossesses précoces et non désirées et comment utiliser un préservatif. Elle a mentionné l’abstinence en disant que c’est la meilleure chose, même si c’est difficile pour nous les jeunes. Ce qui est aussi très important, c’est qu’elle a rectifié certaines informations erronées qui circulent », témoigne-t-elle.

Parmi ces fausses informations, figurent certaines qui sont particulièrement nocives et que les prestataires réfutent : « J’avais entendu dire que le lubrifiant qui était sur les préservatifs est une cause de cancer et j’y croyais, donc j’évitais absolument d’utiliser ces préservatifs. Ou encore, je pensais que le VIH se transmet uniquement par les rapports sexuels », admet Armande.

En RDC, la prévalence du VIH/Sida chez les jeunes de 15-24 ans est de 0,23% sur une moyenne nationale de 1,2%, respectivement selon le Spectrum 2021 et l’Enquête Démographique et de Santé (EDS 2013-2014). La mortalité due aux grossesses précoces reste un fléau : selon le Rapport de surveillance des décès maternels et périnataux et riposte de 2021, les adolescents et jeunes de moins de 19 ans constituent 11% des décès.

Les résultats du processus d’apprentissage collaboratif ont été positifs à la fois pour les prestataires que pour les bénéficiaires. De manière générale, la confiance des adolescents et jeunes dans les services de santé a été renforcée à travers le changement d’attitude des prestataires. Au centre de Saint Clément, la fréquentation par les adolescents et jeunes s’est améliorée : 601 adolescents sur la période de Juillet à Décembre 2020, comparé à 280 sur la même période de l’année précédente, selon la base de données disponibles. 100% d’entre eux se sont dits satisfaits du service reçu lors des interviews de sortie.

Pour Jeannette, c’est un profond changement de perspective et d’attitude : « Comprendre la personne d’abord, c’est la première chose. Ensuite, il faut prendre le temps d’écouter sans se presser, et surtout sans juger. » Un autre avantage que ses collègues et elle ont tiré de cette approche est l’entraide du groupe : « L’expérience des autres nous renforce dans notre propre pratique. Le fait de partager cela nous fournit plus de motivation. »

Tablant sur le succès initialement enregistré dans les six districts, il est prévu d’étendre le projet à d’autres districts de santé en tirant des leçons de cette phase pilote. La mise à l’échelle de l’approche apprentissage collaboratif concernera 5 provinces, avec 25 zones de santé ciblées.

A présent âgée de 19 ans, Armande contraste la première expérience vécue au début de son adolescence avec celle du centre Saint Clément : « Jeannette a été vraiment ‘Play’ ** ! Elle a répondu à mes questions et m’a mise à l’aise. Comparé à mon expérience d’avant, c’est comme le jour et la nuit ! » se réjouit-elle, avant de conclure : « Nous devons avoir des endroits pour nous soigner, pour obtenir de vraies informations ou pour aller nous confier, tout simplement. Je sais maintenant comment prendre soin de moi-même et je me sens plus en sécurité ! »


*Son nom a été changé

**Se dit parmi les jeunes en RDC d’une personne très ouverte et sympathique

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Eugene Kabambi

Communications Officer

WHO DRC 

Tel : +243 81 715  1697
Office : +47 241 39 027
Email: kabambie [at] who.int (kabambie[at]who[dot]int)

Kadijah Diallo

Chargée de communication
Bureau Régional de l'OMS pour l'Afrique 
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