Vers un Burundi Zéro palu d’ici 2030 : le projet « Ecoliers contre le paludisme » porte des fruits

Vers un Burundi Zéro palu d’ici 2030 : le projet « Ecoliers contre le paludisme » porte des fruits

« Grâce aux enseignements reçus sur la prévention contre le paludisme, j’ai commencé à assurer la propreté chez moi, comme on nous l’a appris durant les séances de sensibilisation. Je veille désormais à ce qu’il n’y ait pas d’eaux sales stagnantes près de la maison, ni de hautes herbes autour de la concession. De telle insalubrité favorise la multiplication des moustiques, vecteurs du paludisme. Ainsi, pendant les weekends, dans le cadre des travaux communautaires, je mobilise certains de mes amis et ensemble nous faisons la propreté autour des maisons, de l’école et de tous les endroits susceptibles d’abriter les moustiques. Depuis que j’ai été sensibilisée sur les causes et les mesures préventives du paludisme, je suis arrivée à convaincre tous les membres de ma famille à dormir sous moustiquaire », raconte avec fierté mademoiselle Mugisha Anniella Nicole.

Cette jeune fille de 14 ans, élève en classe de 5ème à l’école primaire de Buganuka, Ngozi, fait partie des jeunes écoliers impliqués dans la lutte contre le paludisme, à travers le projet éponyme « Ecoliers contre le paludisme », initié par l’association ALUMA BURUNDI. Une initiative saluée par Anniella qui estime avoir appris beaucoup à travers ce projet et se sent désormais apte à contribuer à la réduction du taux de paludisme dans sa localité. « Avant que nous ne commencions à bénéficier de ces enseignements sur le paludisme, on enregistrait beaucoup de cas de malaria ici. Moi-même j’en souffrais régulièrement au point où je manquais les cours pendant de nombreux jours. J’ai un frère qui, par méconnaissance des causes et des mesures de prévention contre la maladie, refusait de dormir sous moustiquaire. Conséquence : Il tombait souvent malade du paludisme et reste alité des jours durant à la maison. Mais aujourd’hui, les choses ont changé depuis qu’il a été sensibilisé. Il a installé une moustiquaire dans sa chambre et y dort désormais à l’abri des moustiques. Maintenant qu’on a appris comment mieux se protéger, on peut dire qu’on ne craint plus la malaria », s’extasie demoiselle Anniella.

Lancé début février 2023 avec l’appui financier de l’OMS sur fonds du Gouvernement du Japon, le projet dénommé « Ecoliers contre le paludisme » est une initiative de l’Association Action de Lutte contre la Malaria au Burundi (A.LU.MA- BURUNDI), en collaboration avec le Programme National intégré de lutte contre le Paludisme (PNILP), le Ministère de l’éducation nationale. Conçu dans le cadre de la lutte contre le paludisme, première cause de morbidité et de mortalité au Burundi, ce projet vise à impliquer activement la couche juvénile, qui constitue l’une des franges les plus vulnérables, à la lutte pour l’élimination de ce fléau, véritable problème de santé publique dans le pays. Après quelques mois d’intenses activités de sensibilisation, les différentes parties prenantes ont effectué une descente sur le terrain à Ngozi et Muyinga, du 05 au 08 juin 2023, pour s’enquérir des premiers résultats à travers le feedback des jeunes écoliers, désormais ambassadeurs de la lutte contre le paludisme dans les écoles de ces deux provinces les plus endémiques du pays. 

Iteriteka Kecia, 14 ans en classe de 5ème à l’école primaire, Muyinga. « Les enseignements reçus en matière de lutte contre le paludisme me sont d’une grande utilité, aussi bien pour moi-même, pour mes camarades d’école que pour ma famille. Dans mon entourage, on a pu adopter des comportements qui nous ont aidés à nous protéger du paludisme. L’utilisation systématique de la moustiquaire est entrée dans nos habitudes, ainsi que la propreté autour de nos maisons et de nos écoles. Je suis fière d’avoir pu contribuer à la sensibilisation contre cette maladie à travers le livret qu’on nous a donné à l’école.  Je le prêtais aux enfants voisins de telle sorte que le petit bouquin circulait de maison en maison. Nos parents ont commencé à s’intéresser à ce qu’on racontait et étant donné qu’on leur disait que les enseignements provenaient de l’école, ils nous prenaient au sérieux. Même à l’école, pendant la récréation, la lutte contre le paludisme est devenu notre sujet favori car on s’amuse à instruire les autres enfants des classes inferieures sur la maladie », témoigne Kecia, fière de contribuer à la santé de ses paires mais aussi celle de la communauté, tout comme Niyonkuru Elisé, 16 ans, en 5ème à l’école primaire Buganuka de Ngozi : « Quand j’ai commencé à recevoir les enseignements sur la prévention contre le paludisme, j’ai tout de suite demandé à mes parents de me trouver une moustiquaire et je l’ai fixée au-dessus de mon lit. Par la suite on a aménagé les alentours de la maison qui étaient toujours gorgés d’eaux de ruissellement insalubres et nauséabondes. Avant ce projet qui nous donne l’occasion de jouer notre partition dans la lutte contre le paludisme, personne n’utilisait de moustiquaire chez moi. Et ce n’était pas faute d’en avoir. Bien au contraire ! Dans notre localité, c’était facile de s’en procurer. On pouvait aller prendre les moustiquaires aux endroits indiqués, ou bien les agents de santé communautaires les distribuaient dans les ménages, mais personne n’en faisait dûment usage. Maintenant, ma famille a compris l’importance de dormir sous moustiquaire, et j’aide à sensibiliser mes voisins, mes autres camarades d’école qui à leur tour vont passer la bonne nouvelle au sein de leurs familles », soutient Elisé. 

Que ce soit à Ngozi et à Muyinga, les deux provinces dont certaines écoles bénéficient de cette phase pilote du projet, les jeunes élèves impliqués prennent leur rôle très à cœur, devenant de plus en plus conscients des ravages du paludisme dans leurs régions. 
Par conséquent le jeune Elisé voudrait « que la distribution des moustiquaires s’intensifie et s’accompagne d’activités de sensibilisation plus accrues, car il y a toujours des personnes qui manquent encore d’informations sur les causes et les moyens de prévention contre la malaria et l’utilisation de façon appropriée des moustiquaires », plaide l’écolier de Ngozi dont les propos rejoignent ceux d’Anniella : « Je voudrais demander qu’il y ait beaucoup plus de séances de sensibilisation sur les bienfaits  de l’usage des moustiquaires, car ici dans notre communauté, il y a toujours des personnes qui ne les utilisent pas. Lors des campagnes de distribution massive, ils prennent les moustiquaires et vont par la suite les utiliser pour construire des abris aux volailles ou les utilisent comme filets de pêche », dénonce la jeune écolière de Buganuka dans la province de Ngozi.

Pour sa part et vu la contribution que les jeunes peuvent apporter dans le changement de comportements quant à la lutte contre le paludisme, Iteriteka Kecia de Muyinga lance un appel à ses pairs : « je demanderais à d’autres jeunes de s’impliquer activement dans la lutte contre le paludisme car nous pouvons faire changer les choses dans le bon sens. Nous sommes jeunes, nous avons la force, de l’énergie et l’avenir de notre pays repose dans nos mains, comme on le dit. Nous pouvons donc facilement éduquer nos parents sur comment lutter contre cette maladie, en leur faisant adopter les bons comportements pour la prévention et la prise en charge de la pathologie », argumente Kecia.

De quoi réjouir le cœur des encadreurs de ces jeunes dans le cadre du projet « écoliers contre le paludisme ». « Je demanderais à ce que ce projet soit étendu sur d’autres établissements de notre province. La plupart des personnes adultes ne sont pas instruites, et donc restent réticentes au changement de comportements. Alors, si nous passons par les jeunes qui sont écoutés par leurs parents, nous sommes sûrs que le message va passer facilement et ainsi nous pourrons réduire le taux de prévalence dans notre région », soutient Munyaneza Dismas, Directeur de l’école primaire Magara à Muyinga.

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